Arrêt Bosman : la révolution du football moderne

Arrêt Bosman : la révolution du football moderne

Peu de sports déchaînent autant les passions que le football. Peu d’événements permettent d’unir autant de personnes qu’une finale de Coupe du Monde. Peu d’activités divisent autant que le football, soit on l’adore, soit on le déteste. Le football est en perpétuelle évolution, en corrélation permanente avec son temps. L’Arrêt Bosman a permis au football de prendre une autre ampleur à la fin du XXème siècle. Les impacts de ce mythique jugement seront décrits ci-dessous. 



Tout amateur du ballon rond a déjà entendu parler de cet arrêt. En 1990, un joueur belge du nom de Jean-Marc Bosman souhaite quitter son club du RCF Liège (Belgique) pour signer dans le club de Dunkerque (France). Étant en fin de contrat, cette transaction devait pouvoir se faire selon la volonté du joueur et sans complications. Néanmoins, à cette époque, un club acheteur doit verser une indemnité de transfert au club détenteur, ceci également quand le joueur est en fin de contrat. Après de multiples négociations, Bosman est pris au piège, car Dunkerque refuse de payer l’indemnité et Liège refuse de laisser partir son joueur librement (sans indemnité de transfert). Ainsi, conscient de cette injustice et de l’absurdité du système, Bosman décide d’attaquer son club (RCF Liège) ainsi que l’Union des associations européennes de football (UEFA) en justice. Le 15 décembre 1995, la Cour de justice des communautés européennes donne raison au joueur belge et abolit l’indemnité retenue aux joueurs en fin de contrat. Cependant ce n’est pas cet aspect qui a fait de l’Arrêt Bosman un tournant majeur pour le football européen. 

Avant 1995 et la reddition de la décision par la Cour, tous les clubs de football européens étaient limités à un nombre maximal de trois joueurs extra-communautaires, c’est-à-dire à trois joueurs qui n’étaient pas de la même nationalité que le club. Dans l’Arrêt Bosman, la Cour européenne appuie son jugement sur l’Article 48 du Traité de Rome qui assure la libre circulation des travailleurs au sein de l’Union européenne. La Cour admet les similitudes qui existent entre un footballeur professionnel et un travailleur européen lambda. Ceux-ci ont donc le droit de circuler librement dans l’Union européenne. Ainsi, la Cour prononce l’interdiction des quotas de joueurs extra-communautaires, car ils sont contraires au Traité. Désormais il est possible d’acheter et de transférer librement les joueurs européens. C’est une révolution pour le football et ceci à bien des égards. 

Premièrement, nous faisons face à une explosion du marché des transferts. Nous apercevons une forte augmentation du nombre de transferts exécutés. Le marché étant libre et peu réglementé, tous les clubs achètent de plus en plus de joueurs extra-communautaires. D’un autre côté, les prix augmentent car les clubs souhaitent se renforcer avec de très bons joueurs. Le marché est devenu très concurrentiel, car les meilleurs clubs souhaitent posséder les meilleurs footballeurs. L’Arrêt Bosman n’est pas l’unique cause d’une telle flambée du marché des transferts. D’autres aspects entrent en compte comme le marketing, l’arrivée de propriétaires milliardaires ou encore l’implication des droits TV. 

Deuxièmement, les inégalités entre les clubs de football sont de plus en plus marquées. Les “grands clubs“ européens possédant des moyens illimités (ou presque) achètent de nombreux joueurs afin de se renforcer, tandis que les “petits clubs“ ne peuvent plus concurrencer et deviennent ainsi de moins en moins attractifs et perdent en compétitivité. 

Enfin, l’Arrêt Bosman a également eu un impact sur la formation des joueurs de football. A l’époque, les meilleures équipes étaient celles qui possédaient les centres de formations les plus performants. Désormais, il s’agit d’un réel business. En effet, les “petits clubs“ décrits ci-dessus, ne peuvent pas rivaliser sur le plan financier, ils se doivent donc de trouver un substitut pour combler cet écart. En formant des jeunes joueurs prometteurs, ces clubs pourront les revendre aux “grands clubs“ en se faisant beaucoup de marges ce qui constitue une aide non négligeable sur le plan financier. La formation s’écarte donc de son but premier pour devenir une réelle monnaie d’échange. 

Beaucoup d’autres facteurs peuvent permettre d’expliquer les changements qu’il y a eu dans le football moderne. Néanmoins, rares sont les événements qui ont changé d’une façon si soudaine l’univers du ballon rond durant ces dernières années. L’Arrêt Bosman a amené des changements importants dans l’industrie du football moderne. Cette affaire a également eu des conséquences majeures dépassant le cadre footballistique, notamment sur l’application du principe de la liberté de circulation ou encore pour le sport professionnel européen. Les plus nostalgiques penseront que cette affaire a détruit certains championnats et créé un cadre malsain. D’autres sont de l’avis contraire et évoquent une réelle révolution. Quoi qu’il en soit, tout se plaide dans le football. 

Antoine DOBRYNSKI

GOUGUET, J. J. (2004). Le sport professionnel après l’arrêt Bosman : une analyse économique internationale.

JOHANSSON, S. (2006). L’arrêt Bosman et l’économie des clubs football.

JONATHAN, B. (2013). L’arrêt Bosman (1995), véritable révolution libérale dans le monde du football. 

KADDOUS, C. (1997). L’arrêt Bosman et la libre circulation des personnes au sein de l’Union européenne

PAUTOT, R. (2011). Un football sans frontières avec les arrêts Bosman et Malaja.

ZEN-RUFFINEN, P. (1997). Droit et sport : sponsoring, responsabilité, justice sportive, mesures provisoires, arrêt Bosman, installations sportives, …

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